GÉNÉRATION DYNAMITE

Je voulais écrire un billet, et puis c’est devenu un son. Un son imparfait, amer, violemment vomi. Un son qu’on a bricolé comme on a pu avec mon père, avec l’urgence de le sortir quand il voulait dire quelque chose, vite. Enregistré à l’arrache, arrangé dans la nuit. Mais, aussi bancal et inabouti qu’il soit, j’avais envie de vous le poser là. Les paroles feront office de billet de la semaine, si vous ne m’en voulez pas.

À notre époque de merde, et aux gens qui la servent.

Ma douce France, tu prends cher. Ma douce France, nique ta mère.

5 ans de plus. 5 ans encore. 5 ans sous le bus. 5 ans dans le corps.  

La même chose ou les nazillons. La névrose ou les gros cons.

5 ans à s’opposer, 5 ans à informer. 5 ans à convaincre, 5 ans à lutter.

5 ans à perdre du temps. La plus longue nuit de tous les temps.

Éviter le recul tant que faire se peut au lieu d’avancer tant qu’on pouvait le faire. 5 ans pour convaincre, mon père, ma mère, mon frère.

5 ans et armes inégales, 5 ans et stratégies létales.

Ma France, la moitié de ton peuple en veut encore. La moitié de ton peuple, je t’en veux à mort.

5 et 5, ça fera 10 ans.

Ma jeunesse. De mes 18 à mes 28 ans.

Ma jeunesse qu’on nous envoie dans la gueule.

Leur vieillesse à étouffer ce que nous on gueule.

Quelle bande de lâches, quelle bande d’idiots.

Quels criminels, qui votent pour un mec parce qu’il est beau.  

On m’a condamnée impunément.

On nous chie à la gueule indécemment.

Vos votes de conviction. Vos votes de convives cons.   

Vos petits pourcentages chéris, vos logiques de partis.

Tu n’as pas idée de la colère qui m’habite, ma France.

Tu as créé une génération dynamite, en transe.

Je pardonne pas à ceux qui pillent et s’engraissent sans se mouiller, à leurs contradictions débiles et à leurs choix étriqués.

À leurs valeurs en cartons et leur culture en papier.

À leur crédulité arrangeante, aux idées flageolantes.

Qui pourtant gagnent tout le temps.

Aux abrutis qu’ils élèvent pour les mener à l’abattoir sans sourciller. À leurs petits choix amers et aux batailles qu’ils n’ont même pas à mener.

À leurs privilèges à la con qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.

À tous ceux qui les croient d’un seul coup sans douter.

Aux questionnements qu’ils piétinent.

Aux espoirs qu’ils éliminent.

Ah, tous ces adultes qui me font la leçon en étranglant mon futur.

Tous ces gens sont mes voisins, pourtant ils nous envoient dans le mur.

Tous ces mensonges qu’il faudra défaire, tous ces assassins à qui il faut plaire.

À vos bulletins de vote ridicules, froussards, et ensanglantés.

Je vais foutre le bordel comme on l’a jamais fait.

Cette élection ne me concerne plus, j’ai compris le message.

Allez tous vous faire foutre, je serai plus jamais sage.

Demain on sera dans la rue, moi et ceux sur qui cette nuit il a plu.

Je serai parmi les activistes et les fouteurs de bordel.

On sera ceux qui nettoient vos conneries à l’eau de Javel.

Hors de question que pour vous y’ait du répit

Alors que c’est vous qui décidez de ma vie

Vous avez niqué ma terre et l’horizon

Pas de répit pour vous, hors de question.

Vous nous trouverez partout

On sera touche-à-tout

Vous n’avez qu’un atout

C’est vos putain de sous

Mais quand on cassera vos vitrines et qu’on arrêtera vos turbines

Quand on viendra vous demander si vous pouvez nous expliquer

Vous vous étoufferez en silence, avec la honte comme seule pitence

Et vous la fermerez, sur les émeutes des quartiers,

parce que vous saurez que vous l’avez bien cherché.

Je pense à mon petit frère dont c’était le premier vote,

À mes amis si doux, mes merveilleux potes

À mes parents qui se sont faits violence,  

Sous les coups de vos acquis de conscience.

Je pense aux vieilles âmes qui ont pourtant compris nos cris

Et aux jeunes idiots qui nous feront payer le prix

D’une addition qu’ils ont eux-mêmes creusée

D’une soumission qu’ils ont autorisée.

 Je pense à tous ces cœurs si forts croisés sur le chemin

Qui se sont battus bien forts et pourtant pas assez bien,

Je pense avec un sanglot dans la gorge à celles et ceux qui vont mourir,

À celles et ceux qui vont partir

crever de faim,

à la fin.

Dans un pays où les riches n’ont jamais autant encaissé pour nous confisquer,

Je pense à mes sœurs à mes frères et à celles et ceux qui arrivent encore à rêver,

Merci d’être encore la France qu’on espère

Parce que dans le bureau de vote putain je me sens amère

On a pris pour perpétuité dans l’urne

Votre oasis c’est des dunes

Et ma génération vous emmerde.    

Quand je pense à vous, à ça, aux rêves, j’ai envie de hurler à m’en décrocher la mâchoire, de hurler la fenêtre grande ouverte. J’ai aussi envie de brûler des bus, ou de casser des voitures. C’est ce que font ceux qui parlent sans être entendus, ceux dont la bouche a perdu les mots dans les méandres d’un système trop grand, trop implacable.

Je pense à ça et je sais que ce n’est rien, que c’était perdu d’avance. Je sais que rien ne sert de s’épuiser à lutter contre l’inexorable. Je sais où je serai demain, à colmater les brèches, soigner ceux qui peuvent l’être, donner chaque seconde de mon temps pour garder dans mes bras ceux qui agonisent, et aller confronter les responsables.

Demain, dans la rue encore. Puisque dans les urnes, vous avez dit jamais.

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