La prime au nul

À tous les rabats-joie de notre époque pourrave. Ceux qui ne laissent rien passer, même pas les petites euphories passagères. À toutes les prises de tête, haut les coeurs.

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J’en ai marre de toi. Tu me gaves. Tu me soules. Tu me sors par les trous de nez. Ouais, toi. Avec ta chemise ajustée et ton Apple Watch, tes shampoings solides et ta propagande pro-vélo. J’en ai marre de toi, et de tous les salopiaux de ton espèce.

            Il est 00h02. 2023 vient de poindre. Tu as déjà ricané en disant que tu ne souhaitais rien parce que de toute façon, toutes les années sont nulles. Tu t’es plaint dans l’ordre : de Macron, de ton intestin fragile, de la qualité de la playlist, du prix de l’immobilier à Paris, du manque de transport en communs en « province », de la dégénérescence de la gauche, de ton collègue con.

            Tu as soupiré quand on a bu du vin dans un verre sans pied, tu as été déçu qu’on mange des pâtes pour le nouvel an, tu as passé la soirée à fumer car de toute façon, tu t’en branles du cancer du poumon. Tu as ri parce qu’on était stressés pour rien, tu as plongé dans ton téléphone quand tu as entendu nos conversations superficielles.

            En 2022, déjà, tu avais jugé médiocre la qualité des livres qui paraissent, des films qui sortent, tu avais eu envie d’être de niche, de rester enfoui sous ton dédain. Tu as méprisé les personnes que tu as croisées, toutes engoncées dans leurs préjugés, dans leur vision de la vie (la mauvaise), dans leur petite culture normée (pas la bonne).

            Tu trouves que le monde part en couilles et que ceux qui se bougent le font de la pire des manières, tu les trouves lents, trop gentils, tu les trouves stupides, tu les trouves ridicules. Tu penses qu’il faudrait faire autrement, tu ne jures que par les théories des gens qui te ressemblent. Tu méprises les réseaux sociaux, tu méprises la facilité, tu méprises les failles et comment les autres les comblent. Tu méprises aussi les gens parfaits, tu trouves qu’il faut de l’imperfection là où tu ne la permets jamais.

            Tu penses qu’il n’y a rien à faire en politique, qu’il ne faut pas voter, que ça ne sert à rien. Tu es convaincu que le monde est une tâche, que la vie est une merde, que les gens ont une propension à la bêtise que seuls peu d’entre nous savent éviter.

            Tu n’aimes pas les dîners, tu n’aimes pas les beaux quartiers, tu n’aimes pas la musique « commerciale », tu n’aimes pas la solitude, tu détestes les autres quand ils ne veulent pas de tes conseils, de ton halo de révolutionnaire chevronné. Leurs idées encrassées, leurs routines déprimantes, la façon dont ils s’accrochent au système que tu hais.

            Et ce qui m’embête, c’est que tu as souvent raison. Ce qui m’agace, c’est que je suis d’accord avec toi, sur beaucoup de points. Mais tu comprends, il est minuit deux, et là j’ai juste envie de me vautrer dans ce qu’il nous reste comme joie. J’ai envie que tu la fermes et que tu redescendes parmi le commun des mortels. J’ai envie que mes amis ne se sentent pas idiots, et qu’on ait l’impression qu’on peut encore s’accrocher à quelque chose. J’ai envie que l’empathie compte, qu’elle n’efface pas les théories, mais qu’elle les contrebalance. J’ai envie qu’on arrête de critiquer tant qu’on a pas fait mieux, j’ai envie qu’on réfléchisse et puis qu’à certains moments on réfléchisse pas, qu’on s’autorise les plaisirs simples sans tout intellectualiser, j’ai envie de croire que je suis une bonne personne, j’ai envie de passer une soirée sans dépit, sans dédain, sans désespoir.

            Tu restes planté là, les yeux qui savent mieux, le jugement au bord des lèvres, la déprime calquée sur ton apathie condescendante. Tes leçons de morale, tes vomis intellectuels, ton confort moral, fous-toi les où je pense. J’en peux plus de cette prime au nul, à la destruction, au saccage des bonheurs. On le sait, que tout est naze, ton disque est rayé et la mélodie est grinçante. Je suis pas débile, je veux juste survivre, survivre en espérant un poil de beauté.

On est en 2023. Y’en a qui peuvent plus se permettre de ne pas rire, être un peu naïf et bon. Toi t’as raison, mais t’es triste. Et moi je sais plus quoi faire de toutes ces contradictions dans mon crâne. Alors la fête continue.

2023…

Des espoirs. Du feu. Dans les coeurs et les esprits. Des folies. Des consolations. Des actions. Des liens. Des fourmillements. Voilà tout ce qu’on vous souhaite pour cette nouvelle année, les ami·es, en complément de la santé, parce que oui, c’est vrai, la santé c’est quand même la base. On vous souhaite d’être bien, et de faire bon usage de ce bien-là. On vous souhaite quelques erreurs, quelques égarements, parce que ça rapproche et que sinon on s’ennuie. On vous souhaite de souhaiter des choses, parce qu’à quoi bon sinon.

Et on remercie 2022 au passage. Cette année-ci aura été décisive, malgré les doutes, et avec toutes les euphories. En 2022, en vrac :

Motus a trouvé sa nouvelle tête grâce à Guillaume Basley qui a designé notre logo!

On a lancé le podcast Disparaître, que vous avez fait rentrer dans les tops d’Apple Podcasts !

On a décidé de croire en notre projet, officiellement, en entrant en couveuse d’entreprise

Oïkos, notre podcast écolo, a fait sa première écoute publique

Vacarme des Jours, podcast d’actualité, est devenu hebdomadaire

Notre équipe s’est agrandie ❤

On a publié « Cédez le passage » une vidéo sur la vieillesse :

On a publié un billet d’humeur par semaine, tous intimes et politiques, avec une équipe de plumes fantastique

On a découvert qu’on avait une super commu 🥺 et que nos podcasts font partie des 10% de podcasts qui comptent le plus d’abonné·es sur Spotify (!!)

Mercis infinis pour 2022. On remet ça en 2023 ?

Bonnes fêtes, les ami·es

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Nous sommes déjà le 16 décembre. Ohlala que le temps défile. Il apporte avec lui de belles choses, les idées en pagaille, la vieillesse timide d’une vie que l’on vit bien, et puis aussi, un peu de repos. Pendant deux semaines, Motus & l’équipe du média passent en mode hibernation pour recharger les batteries avant 2023.

Lundi, nous vous partagerons un nouvel épisode d’Oïkos, puis nous enchaînerons sur deux semaines de rediffusion d’épisodes emblématiques de la saison 2. Pour le reste, le média est en pause complète!

On vous souhaite donc d’excellentes fêtes de fin d’années – peu importe comment vous les passez ❤ On sait que cette période, paradoxalement, peut provoquer angoisse et solitude chez certain·es, alors on espère que tous les coeurs trouveront leur moyen de s’apaiser et de se régénérer à l’approche de ce moment particulier du solstice d’hiver.

On vous retrouve le 2 janvier 2023 !

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La team Motus