Par Une Voyageuse Heureuse
Chaque mois, notre Voyageuse Heureuse vous parle voyages, tourismes responsables, écologies. Expatriée au Brésil, ses yeux de Française ont du mal à s’acclimater aux pratiques écolos du pays. Aujourd’hui, elle nous raconte comment c’est là-bas, au Brésil, l’occasion de décentrer le regard et de s’apercevoir que les priorités, les inégalités, les traditions ne sont pas universelles, et que ce qui nous paraît évident ne l’est pas ailleurs. Ou quand la situation politique, la pauvreté et les questions sociales sont inextricablement liées à la gestion des déchets ou l’abattement des arbres du poumon vert de la planète.

Cela fait maintenant 1 mois que je suis arrivée au Brésil. Dans cet article, je souhaite vous parler d’écologie. Car même si je m’étais informée sur le sujet avant de partir, le voir de mes propres yeux est une tout autre réalité.
Le paradis du plastique
Quand je suis arrivée au Brésil, j’ai été surprise de voir à quel point on trouve du plastique à usage unique partout. Même les couverts de restaurants sont emballés dans du plastique (ou du papier parfois).
J’ai alors décidé de me renseigner sur le sujet pour mieux comprendre les enjeux écologiques du pays.
D’après une enquête de WWF (dispo ici) réalisée en 2019, le Brésil se place à la 4ème place des pays producteurs de plastique dans le monde.
Bien qu’une collecte des déchets ait lieu, la séparation et le traitement de ces derniers est plus complexe. De plus, depuis mon arrivée, je n’ai vu que très peu de poubelles de tri accessibles au public. Il y a donc un gros problème d’accessibilité au tri sélectif des déchets. Bien que certaines villes du pays ont promulgué des lois pour réduire l’usage du plastique, ces dernières sont encore insuffisantes. En somme, parmi les 10,3 millions de plastiques collectés, seulement 1,28% sont recyclés.
Cas spécifiques où pullule le plastique :
- Dans les supermarchés où les courses sont portées dans des petits sacs plastiques à usage unique, donnés directement en caisse ;
- Dans les bars (ou tout lieux de loisirs) où l’on vend des bouteilles d’eau plastique ou des sortes de contenant qui ressemblent à des yaourts et qui contiennent de l’eau ;
- Dans tous les magasins et commerces de rue.
Ceux-ci ne sont que quelques exemples généraux.
Les catadores
Le Brésil est un pays où règne les inégalités. Dans cet article, je ne parlerai pas des favelas car le sujet mériterait un article en lui-même. En effet, les favelas sont des lieux particuliers, peu accessibles et où le recyclage est encore plus complexe.
Pour en revenir au Brésil, cette gestion des déchets a permis à des emplois informels de voir le jour, ce qui permet aux habitant·e·s de survivre. Ainsi, il existe des “ramasseurs de déchets” (“catadores” en portugais brésilien). Ces personnes fouillent les poubelles des villes pour en retirer les déchets recyclables (majoritairement bouteilles plastiques et canettes) qui y sont jetés. Ils les revendent ensuite aux centres de tri pour, généralement, de modiques sommes. Les catadores participent à 90% au recyclage des déchets du pays.
L’écologie, c’est politique
Maintenant que nous avons parlé du recyclage, passons à un sujet fortement politisé et médiatisé : la déforestation. Le Brésil abrite la forêt amazonienne, poumon vert de la planète.
Alors que depuis des années, le président actuel, Lula Da Silva, luttait pour la protection de l’Amazonie et des peuples Amérindiens, l’ex-président du Brésil a eu le temps de faire bien des dégâts. La gouvernance de Jair Bolsonaro, du parti conservateur, a eu pour conséquence une forte déforestation et l’expulsion de nombreuses populations. Sa politique s’est notamment basée sur le développement des cultures de soja et d’élevages, très pollueurs. Pour cela, la forêt était incendiée et déforestée pour y laisser la place de construire les infrastructures nécessaires à l’agriculture.
“Entre août 2019 et août 2020, une surface de 11 088 km2, équivalente à 100 fois Paris, est partie en fumée ; du jamais vu depuis 2008. Plus récemment, au mois de mai 2021, la déforestation en Amazonie brésilienne a progressé de 40% par rapport à mai 2020. “ – Greenpeace
Je ne parlerai pas des pesticides utilisés pour les récoltes, autre désastre écologique… Au niveau social, ce n’est pas mieux. Alors que les peuples indigènes vivent en harmonie avec et préservent la nature, leurs conditions de vie sont en danger.
Raoni, chef indien d’un peuple d’Amazonie, a saisi la Cour Internationale brésilienne pour porter plainte contre Jair Bolsanora avec pour motifs : crime contre l’humanité, mise en esclavage et en danger des peuples amérindiens. La Cour Internationale examine encore le dossier. En somme, rien ne les oblige à le traiter.
Ainsi, bien que l’écologie soit un sujet planétaire de première importance, il faut également se rendre à l’évidence, la priorité du Brésil est l’implémentation de politiques sociales pour permettre aux habitant·e·s de vivre (et non de survivre). Cela passe par la protection des peuples indigènes, de la reconnaissance de nouveaux corps de métiers et de plus grandes aides sociales. Je pense sincèrement que, de cela, pourra découler des politiques environnementales car ces deux sujets sont étroitement liés. J’espère de tout cœur que Lula réussira à ramener un peu de paix dans ce pays qui a subi, il y a quelques semaines, des attaques fascistes dans la capitale.
Sources :
https://www.wiego.org/publications/catadores-de-materiais-reciclaveis-no-brasil-um-perfil-esta
https://www.wwf.org.br/?70222/Brasil-e-o-4-pais-do-mundo-que-mais-gera-lixo-plastico
https://www.geo.fr/environnement/le-bresil-mauvais-eleve-du-recyclage-de-plastique-195775