(la liberté du radis-beurre)
Par Enthea
Dans sa chronique régulière La Dialectique du Pet de Rupture, Enthea nous entraîne dans les méandres de nos relations. Aujourd’hui, elle nous parle de ruptures… et paradoxalement, en dit pas mal de bien.

Rupture : Nom féminin. Cessation brusque (de ce qui durait). (Le Robert)
Durée : Nom féminin. Sentiment du temps qui passe. (Le Robert)
Sentiment : Nom masculin. Capacité d’apprécier (un ordre de choses ou de valeurs). (Le Robert)
Il est assez rare d’entendre « Ohhhh félicitations » lorsque l’on annonce rompre avec la personne qui partageait notre vie. On nous offre, en général, des regards tristes et compatissants, ainsi que des petits mots de soutien…
C’est sympa.
Mais quel est le sous-entendu derrière cela ?…Est-ce que rompre doit inévitablement être tragique ?
Est-ce qu’une action aussi simple et indispensable, doit impérativement se vêtir d’une dimension dramatique ? Est-ce au risque, sinon, de nier toutes les valeurs et qualités de la relation rompue ? Pourrait-on résilier une relation comme un abonnement téléphonique ?
Mieux : a-t-on appris à se réjouir d’une rupture ?
Est-ce possible de s’en féliciter, même et surtout, si on a toujours du respect et de l’affection pour la personne dont on souhaite s’éloigner ?
Tirer un trait sur une partie importante de notre vie, est souvent difficile, douloureux, et pas toujours consenti. Mais au final,on fait ce choix pour s’offrir le meilleur. Et c’est souvent à ce moment que l’on découvre à quel point on s’était laissé amoindrir par feu la relation, au point de mettre de côté des choses très simples qui nous plaisaient tant. Pour quelle raison ? Qu’est-ce qui nous pousse à nous adapter, nous sacrifier au quotidien, jusqu’à cesser de manger des radis au beurre alors que ça nous fait plaisir, parce que nous sommes en couple ?
Il n’y a de prime abord aucun lien entre oublier de pratiquer quelque chose qui nous fait du bien, et vivre avec quelqu’un que l’on aime.
Mais pourtant nous avons ce réflexe, tout spécialement pour les personnes éduquées en tant que femmes, à mettre nos envies de côté de manière irrationnelle et non sollicitée, pour mieux s’adapter à la relation. S’oublier devient une qualité et une (fausse) garantie de la solidité du lien. On le fait comme ça, par réflexe. Par adaptation, j’imagine.
A force de pratiquer la rupture avec assiduité, j’ai compris que me retrouver face à moi même rendait visible les moments où j’ai oublié de me respecter ou de m’offrir ce que j’attends de ma vie.. A chaque fin, j’en apprends un peu plus sur ce que je ne désire plus faire, ni vivre. Et particulièrement, sur mes besoins, ce qui est bon pour moi et que je ne veux plus jamais oublier.
Par moment, on se construit en contre, en réaction à quelque chose qui nous a fait du mal. Mais l’intérêt de la rupture va être d’apprendre à se rendre compte de nos besoins profonds et de nos envies futiles, de ce qui nous a manqué, de ce qui était en trop.
Alors, merci pour ça. Merci mes exs, les trous du cul, les géniaux, ou ceux que j’ai oublié, car tous m’ont apporté involontairement (et parfois avec quelques degrés de violence), une compréhension plus précise de la personne que je suis et que je souhaite être. Toutes ces séparations ont, les unes après les autres, fait ressortir les excuses que je me donnais pour ne pas être entièrement moi-même, pour ne pas vivre entièrement mes désirs et aspirations.
Et pour finir, une tendre apologie de la solitude, qui nous apporte (liste non exhaustive, et pas forcément valable pour tout le monde, à compléter à l’envie) :
- Ne plus avoir à rendre de comptes. Pouvoir faire absolument tout. Carrément tout. Même si ça paraît stupide. Même si c’est risqué.
- La confiance en soi retrouvée, du fait de pratiquer les choses par soi même.
- Le soulagement de vivre dans son bordel autogéré.
- Manger en roue libre. Ce que l’on veut à l’heure que l’on veut, où l’on veut.
- Retrouver des finances entièrement adaptées à ses besoins.
- Découvrir du temps disponible pour de nouvelles passions ou de nouvelles personnes.
- La diminution drastique de la charge mentale (et si tu ne comprends pas, c’est possiblement parce que c’était toi la charge mentale.)
Et puis, ça laisse aussi vachement plus de temps pour s’aimer soi même.
Love.
Fight.