MÉDIA ENGAGÉ SUR LES ONDES
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Un lundi comme un autre – Turbulences

Par Laura Wolkowicz

Madrid dans le noir

C’était un lundi comme un autre, j’étais attelée à la table du salon, travaillant sur la présentation que je devais finaliser pour le soir-même. Comme un lundi, j’étais dans un entre-deux, la tête encore dans le week-end et le flux sanguin bien activé par le stress du retour au travail. Il était 12h30 quand ma connexion a cessé de fonctionner, quand mon clavier arrêta d’écrire. Imperturbable, je me suis mise en quête d’un café pour récupérer une connexion et continuer ma journée comme prévu. Mais une fois sortie dans la rue, je me suis rendu compte que je n’étais pas la seule. Ce n’était pas juste mon immeuble, ce n’était pas juste mon quartier, ce n’était pas juste Madrid, ce n’était pas juste l’Espagne, c’était toute la péninsule, la France, l’Italie, la Suisse… Tout le monde y allait de son info, de sa supposition, proclamant une cyberattaque, la troisième guerre mondiale ou je ne sais quelle autre théorie complotiste.

On était comme des hamsters déboussolés à qui on aurait soudainement enlevé leur roue. Toustes bien engagé·es dans notre course routinière, à répéter en boucle la chorégraphie que l’on connaissait par cœur : Travailler, manger, se connecter, s’informer, consommer, sortir, dormir. Un pas de côté et nous étions perdus.

Un lundi, sans nos outils, nous n’étions plus rien : de simples opérateurs sans rien à opérer. Si ça avait été un samedi ou un dimanche, l’histoire aurait été différente. Mais non c’était un lundi et les lundis, c’est raviolis ! Non, les lundis sont productifs, les lundis sont initiatifs, pas passifs.

En relisant ces lignes je me dis, et vous devez sûrement vous dire aussi : elle parle d’une coupure de courant de 12h comme si c’était la fin du monde – les Gazaouis vivent bien pire depuis plus de deux mois ! Mais sur le moment, c’est comme ça que je l’ai vécu. Autant vous dire que si une troisième guerre mondiale venait à exploser, mes chances de survie sont moindres !

Et à côté de ça, les espagnols, aussi flegmatiques qu’à leur habitude y ont juste vu une opportunité supplémentaire pour discuter avec leurs voisin·es et ami·es, se poser en terrasse et boire des coups. Je n’ose imaginer ce qu’il se serait passé si c’était en France : Une manifestation contre l’inefficacité du système électrique se serait montée ? Les êtres malveillants en auraient profité pour piller les commerces ? Tout le monde aurait été en panique ?

Bah oui, ce n’est pas parce que l’électricité saute que la vie s’arrête. Finis les téléphones, finis les réseaux, fini l’argent dématérialisé, finis tous les travaux informatisés et électrisés… On ne peut plus travailler, on ne peut plus produire, on ne peut plus consommer. J’ai rêvé ou ce serait finalement juste la fin du capitalisme ?

Alors que nous reste-t-il ? Nos mains pour faire, nos têtes pour penser, nos lèvres pour communiquer, nos cœurs pour aimer, nos jambes pour nous déplacer, nos pieds pour nous porter… Bref vous avez compris l’idée. Et comme dit Charlotte dans son édito du 1e Mai, je dirais qu’on n’a plus qu’à vivre. Vraiment. Pas dans un simulacre de vie. Mais la vie, la vraie.

Parce que passer huit heures derrière un ordinateur, envoyer mails sur mails, coups de fils sur coups de fils, remplir des tableurs, créer des jolis powerpoint, passer ses journées dans l’air ambiant d’un call center ou d’un open space, rester assis jusqu’à s’en courber le dos, opérer des machines dans des usines, satisfaire toutes les demandes des clients, se tuer à la tâche pour alimenter la machine infernale, ce n’est pas vivre, c’est survivre.

C’est dans le noir de cet « Apagón » qu’une lueur m’est apparue. Alors que le monde s’éteignait, je me suis rallumée. Reboot. Reset. Libérée des chaînes de la pression monétaire qui me tiennent en carotte dans ma roue : « Sans argent, je suis rien. Sans travail, il n’y a pas d’argent. CQFD, je suis travail. » Je sens le vent souffler dans mes cheveux, je me gonfle de légèreté, d’espoir, je me sens voler comme un être libre, libre d’aller où le vent me porte, libre de décider où le vent me portera.

Puis la lumière est revenue. Reboot. Reset. Noir salle. On reprend place dans nos roues et c’est reparti pour un tour. La tête dans le guidon, on suit le chemin tracé comme si rien ne s’était passé, comme au lendemain du confinement. Un espoir a plané dans l’air le temps d’un instant, très vite étouffé par le ronronnement de la machine infernale qui redémarre.

Mais moi je reste plongée dans le noir éclairée à la lueur de ma bougie. Je ne veux pas y retourner. Je ne peux pas oublier. Comme une envie d’acheter How to blow up a Pipeline et d’aller débrancher le réseau électrique national à nouveau pour qu’on se réveille toustes.

Ce lundi-là reste gravé en moi comme la cicatrice d’Harry Potter, un rappel qu’il existe une alternative. À nous de la trouver. À nous de l’inventer avec notre tête, de la façonner avec nos mains et de la partager avec nos lèvres. Vous me suivez ?

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