MÉDIA ENGAGÉ SUR LES ONDES
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Débattre ou ne pas débattre

Par Alice Fournet

Photo de Farknot Architect sur Shutterstock

Il y a quelques mois, j’ai cru débattre avec quelqu’un. Tout est parti d’une question qui semblait montrer de l’intérêt et de la curiosité à propos d’un sujet que je maîtrise, sur lequel je suis documentée et bien informée.

Mais cet échange, si on peut encore le qualifier ainsi, n’avait rien d’un débat, du moins de la conception que j’en ai.

L’objectif était clair : embarquer la conversation sur nos divergences d’opinions, étaler une science en évoquant des mots savants, retoquer chacun de mes arguments en me demandant mes sources et en décidant que les données que j’avançais n’étaient pas véridiques. J’avais forcément tort, je n’étais qu’une woke et lui un mec supérieur.

Je suis allée me renseigner sur ce que signifiait débattre. Débattre c’est donc “discuter une question, un problème, en examinant tous les aspects contradictoires” selon le Larousse.

Selon cette définition, il s’agit donc d’une discussion, avec une répartition de la parole et un principe d’écoute. Le fait d’examiner les aspects contradictoires sous-entend également cette écoute, cette volonté d’échanger et pourquoi pas de s’enrichir, ou d’accepter de ne pas être d’accord mais de chercher à avoir une attitude bienveillante d’échange – cette bienveillance a évidemment pour limite l’absence de respect, de vous-mêmes et de tous les êtres humains –

Je voulais donc vous parler de ces débats qui n’en sont pas.

Ceux où finalement la parole est prise dans l’objectif de montrer une supériorité, un dédain, voire même un déni des opinions. Je veux vous parler de ces débats qui font que même si vous avez adopté une posture d’échange, vous vous retrouvez dans une situation de colère, sans voix ou pris.e d’une grande tristesse, parfois même les trois.

Vous avez en face un mur, qui vous coupe la parole, réfute tout ce que vous avancez, – même si tout est sourcé – et qui cherche simplement à déverser son sentiment de pouvoir.

Face à ces situations qui m’ont mise dans des états d’angoisse et de détresse, j’ai essayé de comprendre comment faire en sorte que ces situations n’arrivent pas.

Je me suis d’abord demandé pourquoi aujourd’hui tout était sujet à débat, pourquoi il était devenu nécessaire de toujours avoir un avis sur tout. Car finalement, débattre c’est aussi prendre position sur un sujet, se positionner pour ou contre. Et force est de constater que la quantité d’informations que nous emmagasinons chaque jour nous embarque dans cette volonté de tout savoir, tout découvrir et très souvent en surface. Trouve-t-on toujours satisfaisant de voir, découvrir ou savoir quelque chose ? Toujours est-il que, pour le commun d’entre nous, même sans être expert.e d’un sujet, nous aimons donner notre avis sur celui-ci, sans forcément garder l’humilité d’accepter que nous ne savons pas forcément tout.

Alors je me suis demandé : est-ce qu’on a le droit de ne pas toujours avoir d’avis ?

J’ai découvert dernièrement dans une newsletter de Philosophie magazine le principe de l’épochè : “Chez les philosophes sceptiques, l’épochè (ἐποχή) désigne la suspension du jugement, le refus de s’exprimer sur la validité d’une proposition”

Est-ce grave dans le monde dans lequel nous vivons de dire “je ne sais pas, je n’ai pas d’avis” ? Est-ce honteux d’avouer que parmi tous les sujets que nous abordons tous les jours, celui-ci n’est pas maîtrisé, voire même inconnu ? J’ai l’impression que oui.

J’ai découvert que parfois, j’étais incapable d’avoir un avis sur un sujet et que c’était ok. Du moins, je considère que c’est ok : et j’écoute, je prends ce qui m’interpelle et j’accepte de ne pas savoir ou de ne pas être d’accord.

Pourtant, même en prenant cette posture je dois admettre que je n’échappe pas à ces attitudes de supériorité qui accompagnent les personnes qui souhaitent cracher leur venin.

Même en admettant très honnêtement “non je ne connais pas ce sujet” ou “je n’ai pas d’avis sur le sujet”, j’ai à plusieurs reprises eu ce déversement de savoir hasardeux.

Viens ici ma seconde question, doit-on toujours débattre ?

Ma réponse ne va pas vous surprendre : je crois sincèrement qu’il y a des personnes avec qui le débat meurt.

Plutôt que de rentrer dans un échange, une volonté d’écouter une personne et son point de vue, ces débats – qui n’en sont pas – encouragent à l’attaque. Ou est-ce une position de défense ?

Pour rappel, débattre c’est discuter, en examinant tous les avis contradictoires. Débattre ce n’est donc pas parler sans écouter mais bien considérer les individus et les idées en face. 

A plusieurs reprises, j’ai vécu cette situation où j’interrompais la plaidoirie adverse, en affirmant « non, on va s’arrêter là, nous ne sommes pas d’accord et nous n’allons l’un.e comme l’autre pas changer d’avis. »

Est-ce que cela fait de moi une personne incapable de débattre ? Peut-être. Mais débattre ce n’est pas forcément chercher à faire changer d’avis quelqu’un. C’est avancer des arguments, sans chercher à avoir raison ou tort.

Alors, quand je me retrouve dans une situation où je comprends que l’objectif du débat est de me décrédibiliser et de jouer avec le “ce que j’aime bien quand je débats avec toi c’est qu’on sera forcément pas d’accord”, je m’épuise. Je prends cette violence directement pour moi, je suis abasourdie par cette dernière et je perds ma voix.

Cette situation, vous êtes peut-être nombreux.ses à l’avoir vécue lors des fêtes de fin d’année, en voyant que l’objectif était uniquement à visée provocative et non d’échange.

Ma troisième question est plutôt rhétorique – est-ce sain de débattre quand le début de l’échange est sujet à de véritables tensions ?

Je m’explique. Dernièrement, certains sujets me font sortir de mes gonds et je rentre dans une posture de défense de mes convictions. Je perds beaucoup d’énergie à le faire et forcément, je deviens la personne qui débat pour faire changer l’avis de la personne en face sans essayer de comprendre la position qu’elle défend.

Alors voilà, suite à ces différentes expériences, dont certaines m’ont sonnée, j’ai décidé que débattre n’était pas possible avec tout le monde, et que parfois je préférais m’en préserver.

J’ai décidé d’appliquer une méthode en 2024 qui consiste à me préserver de ces débats qui n’en sont pas :

  • Identifier les questions qui sont posées uniquement par provocation
  • Se placer dans une posture d’écoute – même si nous sommes en parfait désaccord – et questionner la personne en face pour comprendre son point de vue, sans donner d’argument qu’elle puisse réfuter
  • Essayer de donner des preuves / sources, et arrêter si la personne passe son temps à les réfuter par principe
  • Dire non, et insister sur le “on ne sera pas d’accord et nous pouvons clore cet échange”

Je ne vous garantis aucune efficacité. Je vous encourage surtout à ne pas complètement remettre en question vos engagements et votre légitimité à aborder des sujets face à des comportements qui chercheraient à vous faire douter.

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